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vendredi 5 mars 2010

Xynthia : Raz de marée
en Charente Maritime


Mortagne, Port Maubert, Vitrezay : 
Les ports de l’estuaire submergés

• Situation préoccupante dans les environs de La  Rochelle

• Une aide de 25 millions d’euros pour la reconstruction



À l’heure des bilans, Xynthia a provoqué la mort de douze personnes en Charente-Maritime, plus de cinquante en France. Plus meurtrière que l’ouragan de 1999, elle a atteint de plein fouet les zones côtières qui ont alors subi une “submersion“ inattendue et terriblement rapide. L’eau a tout envahi et, en de multiples endroits dont l’Île de Ré, certaines digues ont cédé. En décembre 1999, les communes de Haute Saintonge, situées en bordure d’estuaire, avaient été victimes du même phénomène et la centrale nucléaire de Braud Saint Louis avait connu des sueurs froides. 
Lundi, le département sinistré a reçu la visite du Président de la République, Nicolas Sarkozy. 
Une aide de 25 millions d’euros est annoncée. A la détresse humaine, s’ajoutent des dégâts matériels importants.





Vents violents, marée à fort coefficient, dépression, cette triple alliance a plongé certaines communes de Charente-Maritime et de Vendée dans un véritable cauchemar. Chaos, le mot n’est pas trop fort. Durant la nuit de samedi à dimanche, la tempête a provoqué un vaste naufrage. La mer s’est invitée là où on ne l’attendait pas, s’engouffrant dans les maisons à une vitesse rapide, en un quart d‘heure, vingt minutes. Près de l’estuaire de la Gironde, elle a rejoint les falaises du Crétacé, faisant fi des routes et des terres asséchées par l’homme.




Effrayés, certains habitants n’ont eu d’autre possibilité que de se réfugier sur les toits. Toutes les zones littorales ont été concernées par ce phénomène accentué par la tempête. Sans sa violence, la fameuse surcote (dépassement anormal du niveau de la marée haute) aurait été évitée.
Faut-il y voir une fatalité ? sans doute. Une tragédie, c’est une évidence quand, dans l’actualité internationale, les catastrophes s’enchaînent : tremblements de terre en Haïti, au Chili, menaces de tsunami dans tout le Pacifique, inondations, vrai faux réchauffement climatique. La Terre deviendrait-elle inhospitalière ? C’était précisément la question que posait Christophe Dechavanne samedi soir sur TF1. L’un de ses reportages (pas le meilleur !) était consacré à la fin du monde annoncée par les Aztèques pour 2012.
Son émission serait-elle prémonitoire ? Quelques heures plus tard, en effet, avec une avance sur le calendrier, ce fut effectivement la fin du monde en certains endroits du rivage atlantique. Xynthia venait de frapper. Mais ne tombons pas dans les travers des “faux prophètes“…

Huîtres et moules atteintes 
de plein fouet


Aujourd’hui, la Charente-Maritime est en deuil et des questions cruciales se posent. Outre la détresse des habitants et les questions matérielles que devront régler les assurances, des pans d’activités sont sévèrement touchés dont la restauration, l’agriculture, l’ostréiculture et la conchyliculture.


L’heure est à la solidarité. Nicolas Sarkozy, Dominique Bussereau, président du Conseil général et Ségolène Royal, présidente de la Région, ont promis des aides à la reconstruction et au redémarrage du secteur économique. Les deux candidats aux Régionales ont d‘ailleurs arrêté leur campagne pour se rendre auprès des sinistrés. De nombreuses familles ont tout perdu en l’espace d’une nuit et le préjudice est abyssal à l’échelon national (un milliard d’euros). Toutefois, beaucoup veulent croire en des lendemains meilleurs et n’envisagent pas de quitter leurs communes : « nous sommes vivants, c’est la seule chose qui compte. Les objets, nous les remplacerons. Les réparations, nous les ferons ». En Vendée, la recherche de victimes, prisonnières de leurs maisons submergées, s’est poursuivie durant toute la semaine. Certains lotissements étaient difficilement accessibles et de tristes découvertes y ont été faites.

En voyant les photos aériennes, il est un détail que Philippe de Villiers, président du Conseil général de Vendée, a soulevé clairement dès le lendemain de la tempête. Certains responsables n’auraient-ils pas cédé à la pression de spéculateurs immobiliers en construisant dans des zones à risques ? Durant cette dernière décade, face à la demande croissante, on a édifié à tout va, sans trop se soucier de l’endroit, ni de l’agencement de ces lotissements censés accroître les taxes foncières et d’habitation des communes. Pour l’instant, on préfère évoquer l’état des digues dont certaines, mal entretenues, ont effectivement cédé. Ces sujets seront abordés dans le détail quand les priorités auront été traitées, c’est-à-dire quand la vie aura repris un cours (à peu près) normal.

En Haute Saintonge, Mortagne, Vitrezay et Port Maubert sous les eaux

Contrairement à 1999 où les maisons ont été sérieusement malmenées et la forêt dévastée, la Haute Saintonge a subi la tempête, mais elle a résisté. La plupart des toitures, refaites ces dernières années, sont en bon état et ont tenu le choc.
Au centre de secours de Jonzac, le lieutenant Carré intervient avec son équipe sur les communes de l’arrondissement, auxquelles s’ajoute Mortagne : « Près de l’estuaire, on nous avait annoncé une lame d’eau plus importante qu’en 1999, trente centimètres environ. Nous étions tous sur le qui vive ». Dans la première partie de la nuit, les pompiers ont été appelés pour des toitures endommagées (quatre sur le canton de Jonzac, trois sur Archiac, deux sur Montlieu) et, un peu plus tard, pour des arbres (une quinzaine) qu’il a fallu dégager car ils gênaient la circulation. Jusque-là, rien de grave, la région résistait aux éléments.



Les choses se sont corsées vers 3 h du côté du port de Vitrezay, Port Maubert et Mortagne, l’eau montant à vitesse grand V. « Nous avons aussitôt envoyé des sauveteurs aquatiques et des zodiac dans ce secteur » souligne le lieutenant Carré. Les hommes ont alors porté secours à plusieurs familles dont une femme et ses deux enfants habitant une maison isolée à Vitrezay : « l’eau est arrivée subitement. Toutefois, elle a été moins haute que les prévisions. La partie sud du marais a été relativement épargnée ».
À Port Maubert où une digue a lâché, des maisons ont été inondées ainsi que le terrain de camping. Même situation à Mortagne où les habitations et bâtiments proches du port ont été envahis. L’eau a repris ses marques, allant jusqu’aux anciennes falaises, aujourd’hui prisonnières des terres. Les anciens n’avaient pas vu ça depuis des lustres…




« La vague a atteint un mètre environ. Elle est venue très vite, à la vitesse de la marée » explique le lieutenant Carré. Surpris, les gens ont très vite réagi et l’entraide est à souligner. La municipalité a proposé des bâtiments communaux pour héberger les sinistrés. À Mortagne, il suffit de monter sur le promontoire pour être au sec ! « Durant la nuit, nous avons porté secours aux personnes en difficulté. Dimanche, nous avons axé notre action sur le dégagement des routes, le nettoyage. Nous sommes intervenus en particulier sur les communes de Mortagne et de Saint Fort sur Gironde. Une partie de l’équipe est partie aux Boucholeurs et sur Aytré apporter son aide ».
Lundi, la question était de connaître les effets de la prochaine marée dont le coefficient était important. Fort heureusement, la situation est restée stable grâce à un vent “raisonnable“.

En ce qui concerne l’électricité, elle a été coupée sur le canton de Saint Genis (Mosnac, Clion, Plassac) et sur quelques communes du canton de Montguyon. Les choses sont rentrées dans l’ordre assez rapidement. Idem pour le téléphone.

Si la région de Haute Saintonge a eu plus de peur que de mal, l’Aunis, quant à lui, a connu une véritable catastrophe et les témoignages des victimes ont touché le pays entier. Nos pensées émues vont vers ces familles endeuillées et meurtries. Le traumatisme est réel et ceux qui ont connu 1999 peuvent en témoigner : dès qu’une violente tempête est annoncée par Météo France, l’appréhension monte et le cœur bat plus vite. Ces tempêtes, nous ne sommes pas près de les oublier, mais il faudra bien s’y habituer : désormais, elles nous visitent régulièrement…





Photo 1 : Les ports de Charente Maritime et de Vendée ont été particulièrement touchés

Photo 2 : Boyardville, dans l'Ile d'Oléron, où plusieurs quartiers sont les pieds dans l'eau

Photos 3 et 4 : L'efficacité des secours est à souligner

Photos 5 et 6 : Du côté de Mortagne, l'eau est revenue au pied des falaises du Crétacé

Photo 7 : A Brouage, elle a rejoint les anciennes fortifications, redonnant à la citadelle son aspect d'antan

Photos 8 et 9 : Les parcs ostréicoles ont été sévèrement endommagés

Photo 10 : Le port de Mortagne a été victime d'une vague d'un mètre qui a inondé les maisons

Photo 11 : Les terres gagnées sur l'estuaire, inondées par le raz de marée

Photo 12 : À Talmont, l’eau a submergé la route et s’est répandue dans les terrains environnants. Si le patrimoine y a été épargné, dont la belle église Sainte-Radegonde, la falaise du Caillaud est interdite au public (une partie s’est effondrée) et des carrelets ont été détruits. Dans ce bourg hautement touristique, l’heure est au nettoyage.

Photo 13 : Fouras, un secteur où l'urbanisation est importante

Photo 14 : Qui veut un tronc d'arbre ?

Photos 15, 16, 17, 18 : L'eau, encore proche des maisons...

Photo 19 : Fort Boyard : il a tenu le choc !

Photos Nicole Bertin (tous droits réservés).

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