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samedi 5 janvier 2008

Jean-Claude Beaulieu à Djibouti

Le député Jean-Claude Beaulieu, colonel de réserve, est rentré d’une mission humanitaire à Djibouti. Durant cinq semaines, son centre d’opération a été l’hôpital Bouffard qui prodigue des soins aux militaires et à la population civile.


Aller à Djibouti, c’est entrer dans une autre dimension. Face au golfe Aden, l’Occident et l’Orient s’y observent de longue date. La fameuse Corne de l’Afrique, que baigne la Mer Rouge, n’a rien perdu de ses secrets. Surgissent en mémoire des écrivains connus, Joseph Kessel, Henri de Monfreid ou Arthur Rimbaud, aventuriers des flots et des mots. Cette terre lointaine ne laisse jamais insensible : on l’aime à travers ses paysages contrastés ou on la déteste pour la rudesse de son climat.
Le député Jean-Claude Beaulieu en témoigne : dès qu’on quitte les établissements climatisés, la chaleur est étouffante. Ce qui n’empêche pas des pluies torrentielles en automne...

Un hôpital moderne

Du 27 juillet au 2 septembre, le dr Beaulieu a donc été accueilli à l’hôpital Bouffard dans le cadre de la réserve opérationnelle. Depuis plusieurs années, il apporte sa pierre à l’édifice humanitaire et ses missions l’ont conduit en différents pays. Bien que lieu stratégique, proche du Canal de Suez, Djibouti est une zone plus calme que l’Afghanistan (on ne peut pas en dire autant de la Somalie). Du moins peut-on sortir dans la rue sans porter un gilet pare-balles ! Sur place, l’armée tricolore est très présente (3000 hommes), de même que les forces américaines. La France est chargée, entre autres, d’assurer la sécurité du territoire (mirages, hélicoptères, avions de transport). Djibouti reste la première base de l’armée française en Afrique, porte ouverte vers le Moyen-Orient et l’Océan Indien.
L’hôpital Bouffard est un établissement moderne qui traite de nombreux patients, militaires, familles, membres du gouvernement, des ambassades et civils, contrairement à l’hôpital américain qui ne soigne que les personnels de l’armée. Doté de 56 lits, ses différents services (chirurgie, médecine, bloc opératoire, laboratoire) permettent de travailler dans de bonnes conditions. Son budget est de 40 millions d’euros. À la pointe du progrès, il dispose d’une maternité - 800 accouchements sont pratiqués par an par deux sages-femmes - et d’un scanner : On est bien loin des centres précaires, malheureusement légion en Afrique. « L’hôpital compte deux chirurgiens en permanence. Pendant ces cinq semaines, j’ai pratiqué plusieurs sortes d’interventions, traumatologie, accidents, crânes enfoncés (1), ablation de vésicules, problèmes gynécologiques, césariennes ». Le pays ne dispose pas de Sécurité Sociale, comme on s’en doute. Les plus nantis paient un forfait tandis que les plus pauvres, 20 % des patients, sont soignés gratuitement. Le sida y sévit moins qu’en Afrique noire. Les pratiques religieuses pourraient expliquer cette situation.



Ils échappent miraculeusement à un crash aérien

Parmi ses patients, Jean-Claude Beaulieu a porté secours aux deux seuls survivants d’une catastrophe aérienne. L’avion s’étant écrasé en Éthiopie, échapper à cette tragédie relève du miracle. La femme, enceinte de sept mois et demi, était blessée aux bras et au thorax. L’état de l’homme était bien pire : outre un traumatisme crânien, il présentait une fracture ouverte à la jambe et son bassin était cassé. Sur place, après les « premiers soins » (assez limités), les autorités les ont dirigés vers Djibouti treize jours plus tard. Pour y parvenir, ils ont dû parcourir 800 kilomètres dans des conditions inimaginables (liées au relief et aux routes), sans compter des souffrances insupportables. Toutefois, la vie est endurante : par cette histoire qui se termine bien, elle l’a montré une nouvelle fois !
Ces deux personnes ont fini par recevoir les soins qui s’imposaient. Le bébé, qui suscitait des inquiétudes, avait été épargné par le choc : « à l’échographie, nous avons constaté que tout allait bien, au grand soulagement de sa mère et du nôtre, par la même occasion ». Quand il ou elle aura grandi, il est évident que cet enfant aura des choses à raconter sur sa venue au monde ! Quant au second rescapé, il devrait remarcher dans quelques mois.
Ils reviennent de loin ! Idem pour un petit chamelier, victime d’une vipère dans le désert. « Amené deux jours après la morsure, il a passé huit jours en réanimation. Fort heureusement, nous l’avons sauvé après avoir amputé le bout du doigt infecté. C’était émouvant car ce nomade, d’une dizaine d’années, ne connaissait pas la ville et encore moins l’hôpital. Nous l’avons entouré et lui avons donné des jouets. Je pense qu’il se souviendra de son séjour »...
Jean-Claude Beaulieu a tissé des liens avec les malades et le personnel soignant : « J’ai fait la connaissance d’un médecin français qui s’est installé à Djibouti, il y a vingt ans. Il ne regrette rien, au contraire. Il vient de s’associer avec une pédiatre qui n’aura pas à souffrir de la concurrence car cette spécialité est peu représentée ». Bref, si vous avez envie de vous expatrier, des opportunités sont à saisir. Parmi les projets, l’ouverture d’une petite faculté de médecine serait envisagée.
Jean-Claude Beaulieu a apprécié cette mission qui lui a permis de découvrir un autre visage de l’Afrique ainsi que de côtoyer une équipe médicale «remarquable», avec laquelle il a eu plaisir à travailler.
Cette année, il ignore où le conduira sa prochaine mission. Au Liban, peut-être ? Entre-temps, il aura retrouvé la vie politique française et la Commission défense du Parlement en particulier...



1 - Quand ils s’agressent, les Djiboutiens se donnent volontiers des coups de pierre à la tête, geste très néfaste pour l’état de leur crâne qu’il faut alors réparer. Tout rapprochement avec Pierrette, la néandertalienne de Saint Césaire - dont on sait qu’elle reçut un fort choc à la tête - serait purement fortuit. Il est à noter que les Djiboutiens chassent, au jet de pierres justement, avec une très grande adresse. «Ils ratent rarement le gibier» attestent ceux qui les ont vus à l’action.

Dis le moi dans l'oreille...

• Quand Djibouti et Aden rivalisaient...

Avec le percement du Canal de Suez par F. de Lesseps au XIXème siècle, la Mer Rouge est devenue un lieu de passage très fréquenté. Au début du XXème, des milliers de navires allant aux Indes, Chine, Océanie ou se dirigeant vers Madagascar, y passaient chaque année. Les Anglais, qui faisaient un commerce important avec l’Extrême Orient, s’étaient établis sur la côte arabique, à Aden. La France, quant à elle, avait opté pour la “rive“ africaine en occupant d’abord Obok, puis Djibouti qui se développa à partir de 1888. En effet, le site de Djibouti (escale navale vers Saïgon en Indochine) offrait une sécurité plus grande aux bateaux. Il est évident qu’une rivalité quant au trafic maritime s’instaura entre Djibouti et Aden, c’est-à-dire entre Français et Anglais, situation coutumière entre ces deux peuples ! Après avoir été sous contrôle français, Djibouti est devenue indépendante en 1977. Cela n’empêche pas la France d’avoir une force armée assez conséquente sur ce territoire de 794.000 habitants ...


• Pour ne pas gaspiller l’eau, les douches sont toujours froides. Pas question de s’éterniser dans la salle de bains !

• Environnement : Un gros égoût de la ville se déverse non loin de la plus grande plage de Djibouti. Mieux vaut sortir vaccinés pour le bain...

• Construction d’un nouveau port : En raison du trafic important, ce nouveau port en eau profonde permettra à Djibouti de connaître un véritable essor commercial. Une manne que ne saurait manquer ce pays dont le PIB actuel est de 0,81 milliard de dollars. Dubaï y investit largement ainsi que les USA. Un très bel hôtel va d’ailleurs être construit dans les environs avec, dit-on, un casino. Dans cette ville où le soleil cogne, le « must » est la piscine rafraîchissante à 28 degrés (dans un autre hôtel) dans laquelle plongent des privilégiés !

• Jean-Claude Beaulieu a profité de son séjour pour découvrir la région : lac Assal, paysages lunaires, montagneux, canyons. On rencontre peu d’animaux : chameaux, dromadaires, singes, antilopes...

Photo 1 : Jean-Claude Beaulieu de retour en Charente-Maritime.

Photo 2 : Vue aérienne du port de Djibouti (photo S. Roux).

Photo 3 : Sur cette carte du début du XXème siècle, on remarque l’importance du trafic dans cette partie du monde, porte vers l’Orient et l’Indochine.

Photo 4 : Avant Djibouti, les Français étaient installés à Obok.


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