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mardi 17 juin 2025

Patrimoine/En balade à Verdelais : Quel calvaire !

Située non loin de Malagar, le domaine de l'écrivain François Mauriac et du château du peintre Toulouse Lautrec, la basilique de Verdelais en Gironde est connue pour ses pèlerinages qui attiraient de nombreux fidèles jusqu'au milieu du XXème siècle. Parmi les éléments majeurs de son patrimoine, une Vierge à l'enfant du XIVe siècle, un imposant chemin de croix (XIXe siècle) construit au milieu des bois et surtout un calvaire édifié sur un tertre qui domine la vallée de la Garonne. Impressionnant tant par sa dimension que sa situation géographique !

La basilique
Cette gravure montre les quatorze stations et le calvaire
(©Sanctuaire Notre-Dame de Verdelais)
Le calvaire : Endommagé, il n'est plus accessible
Quel panorama !
Verdelais en fin de matinée. Le soleil est déjà au zénith. En ce lundi de Pentecôte, la place du village, ombragée, paraît étrangement vide. Le temps semble s'être arrêté dans cette commune dont la basilique est l'objet de toutes les attentions. Deux restaurants jouent les ambassadeurs. L'un ne sera ouvert que le soir, l'autre accueille les visiteurs, heureux de trouver un havre. Reviennent en mémoire les souvenirs qu'évoquaient les aïeules, en pèlerinage en ce lieu dans les années 1950 : les rencontres, les prêtres, les dévotions. L'affluence, l'encens, la foi tout simplement. Les fidèles se rendaient à Verdelais pour célébrer Marie, consolatrice des Affligés, portés par la même espérance que celle qui animait leurs voisins de Saintonge, priant avec ferveur à Croix-Gente, près de Montendre. De ce site, il ne reste qu'une minuscule chapelle, l'église neuve ayant été démolie et les maisons vendues à des privés. « Les temps sont durs » reconnaissent les anciens qui s'inquiètent de l'absence d'une relève le dimanche à l'église. Dans les campagnes, elle peine à émerger. La jeunesse pense à autre chose tandis que peu à peu, les Bouddhas made in China peuplent de leur douce sagesse les rayons de certaines enseignes commerciales. 

La basilique de Verdelais n'en garde pas moins sa prestance et son clocher glorieux, coiffé d'une statue de la mère de Jésus scintillant au soleil. Si l'on en croit les nombreux ex-voto placés dans l'édifice en remerciement, des guérisons miraculeuses ont été constatées. Les plaques se touchent tant elles sont nombreuses et plusieurs dates sont récentes. On voit aussi des béquilles suspendues dans une chapelle latérale, devenues inutiles à leurs utilisateurs. Au milieu du retable, se trouve la statue de Marie rapportée de Terre Sainte, dit-on, par le Seigneur de Macaire, Géraud des Graves, au moment des croisades. Elle est restée est un "phare " qui a guidé des générations de chrétiens. Volée durant la guerre de cent ans, elle aurait été retrouvée « à la fin du XIVe siècle par la comtesse Isabelle de Foix-Castelbon, épouse d'Archambaud de Grailly, sous le pas de sa mule alors qu'elle se rendait à son château ».

Miracles et guérisons


Suivirent les guerres de religion entre Catholiques et Protestants qui la malmenèrent une nouvelle fois : « En 1558, les guerres de Religion font rage et la chapelle est à nouveau mise à sac et incendiée. La statue est récupérée intacte du brasier et les habitants de Verdelais décident de la cacher pour la protéger. Ils la mettent à l'abri dans le tronc d'un arbre d'où elle ne sortira qu'en 1605. Quatre ans plus tard, le 28 mars 1609, le cardinal François d'Escoubleau de Sourdis, archevêque de Bordeaux, visite la région. À la suite de la demande insistante des habitants, il envisage de faire restaurer l'église » soulignent les historiens. 

La période révolutionnaire n'est guère moins mouvementée : « Lors des troubles, l'église et le couvent sont dépouillés par ordre de l'administration civile du district de Cadillac. L'ensemble des biens du clergé sont vendus aux enchères, excepté l'église ». Durant le Terreur, c'est le summum : « L'histoire raconte que le maire et l'ensemble du conseil municipal demandent au sacristain que la statue soit abattue. Il s'y oppose en s'exclamant : « Je craindrais que Dieu m'écrasât dans le moment même ! Et d'ailleurs, j'aime mieux obéir à Dieu qu'aux hommes ! ». Le maire ordonne à un maçon, ancien soldat, de s'en charger, mais ce dernier refuse également déclarant : « Et moi je te dis, fais-le toi-même, citoyen maire, et montre si tu l'oses ! Pour moi, jamais ! ». Le maire, tente de s'en charger... mais n'y arrive pas et chute en escaladant le maître-autel. Il fait fermer les portes de l'église et en interdit l'accès sans autorisation ». Sombre période...

En août 1821, Mgr Charles François d'Aviau du Bois de Sanzay, rachète le couvent et le cloître. Il en fait une maison de retraite pour les prêtres du diocèse, puis il confie la gestion du lieu aux Pères maristes en 1838. On lui doit l'important clocher, le calvaire aux trois grandes croix, les chapelles de la Sainte-Agonie et du Saint-Sépulcre, les quatorze stations du Chemin de croix. Les scènes des stations sont réalisées en haut relief de stuc. De nos jours, plusieurs sculptures sont très abîmées et la montée au calvaire par l'escalier est interdite pour des raisons de sécurité. « La réfection du chemin de croix a débuté. Toutefois, la municipalité ne peut faire face seule à ces dépenses. Il est donc fait appel à la générosité des citoyens, car ce lieu bien que célèbre et fréquenté n'est pas classé »

Le site de Verdelais garde son rayonnement, mais il nécessite des travaux dont ont parfaitement conscience la mairie et le diocèse. Patrimoine témoin d'un temps, mais aussi patrimoine émouvant et magnifique. Puisse-t-il continuer à conter sa longue histoire aux touristes et guider les croyants sur leur chemin spirituel...

• Fête du couronnement de Notre-Dame de Verdelais dimanche 6 juillet 


Que rapportent les historiens au sujet de Verdelais ?

• A  son retour des croisades, le seigneur de Saint-Macaire, Géraud des Graves, fait réaliser un oratoire en l'honneur de Marie. L'ordre monastique des Grandmontains prend le relais en faisant édifier une chapelle. Les miracles commencent, le lieu devient rapidement populaire et fréquenté. 

• La première église, élevée au XIIe siècle, était de style roman. La basilique a été construite au XVIIe siècle par les Célestins  qui l'ont agrandie. L'ensemble de l'édifice est de style Renaissance et le retable est baroque. Au sommet du clocher réalisé par l'architecte Duphot, s'élève une statue de la Vierge Marie. Haute de 3,75 mètres, réalisée par Thomas-Joseph Armand-Calliat, sculpteur et orfèvre, elle est en cuivre et recouverte d'une pellicule d'or.

Sur le clocher, la Vierge Marie est en cuivre, recouverte d'une pellicule d'or
Marie, consolatrice des Affligés, au cœur de la basilique
 

• Exuperantia : Cette Sainte a vécu à Rome au IVème siècle. Elle veut se convertir au christianisme, mais son père y est farouchement opposé. Furieux, il l'égorge. « La poupée de cire, qui sert de reliquaire, porte la marque rouge au cou ». Les reliques d'Exuperantia ont été ramenées d'Italie par des pèlerins bordelais au XIXème siècle.

• Célèbre lieu de pèlerinage des catholiques de Nouvelle-Aquitaine, l'église a été élevée au rang de basilique mineure le 31 juillet 1924 par le pape Pie XI. Elle est inscrite aux Monuments historiques depuis 2000.

• Un musée d'art sacré

A l'origine, un religieux mariste hollandais, le Père Van der Wielon, souhaitait valoriser le remarquable patrimoine sacré du sanctuaire. Sensibles au projet, le dr Barès, maire de la commune, et Raymond Darricau, universitaire bordelais, appuient sa démarche. Le musée d’Art Religieux, situé dans une aile de l’ancien couvent des Célestins (XVIIème siècle), est aménagé avec le concours financier du Conseil Général de la Gironde et du Conseil Régional d’Aquitaine. Il est inauguré en 1990. Il comporte une belle collection d’orfèvrerie sacrée, d’ex-voto peints, de chasubles, de vêtements liturgiques, de statues en bois sculpté, de cœurs en argent etc. 

• Quel calvaire !

A la fin du XVIIe siècle, un premier calvaire est établi sur le mont Cussol par le père Proust, avec seulement quatre chapelles. En 1856, le Cardinal Donnet accompagné de huit Évêques et de 500 prêtres, couronne la statue de Notre-Dame de Verdelais et consacre le diocèse de Bordeaux à Notre-Dame. Il bénit trois croix en bois sur le mont Cussol. En 1868, un violent orage brise une des croix. Elles sont remplacées par des croix métalliques de 12 m de hauteur.

La municipalité a pris en charge le Calvaire par la signature d’un bail emphytéotique avec le Diocèse en 2007.

Au sommet du coteau, le calvaire domine la vallée
Station du chemin de croix 

Photos Nicole Bertin

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