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lundi 5 novembre 2012

Crazannes :
La galaxie des pierres levées


Carnac, Stonehenge figurent parmi les lieux les plus connus du monde entier. Leur existence reste une énigme. Quel but recherchaient les hommes en érigeant ces blocs énormes vers le ciel ? Consciente qu’un flambeau est à transmettre, l’association des Lapidiales de Port d’Envaux, que soutient le Département, a un grand projet : créer « la galaxie des pierres levées » sur la commune de Crazannes. 
 
Au départ, il y a les Lapidiales de Port d’Envaux que préside Alain Tanenbaum. Sur de vastes fronts de taille, au lieudit les Chabossières, des sculpteurs y laissent leurs empreintes chaque année. Cet endroit, ouvert au public en toute liberté, est sans doute l’un des plus insolites de Charente-Maritime. On s’y promène en admirant le talent d’artistes venus du monde entier.

Il y a quelques années, une nouvelle idée a germé dans la tête des responsables. Ambitieuse, il s’agit cette fois de créer « une galaxie des pierres levées », dans le droit chemin des dolmens et menhirs d’autrefois. Ces témoins d’un temps reculé ne manquent pas en Haute-Saintonge quand ils ont eu la chance d'échapper à l’empierrement des chemins ! On peut en voir un bel exemple à la Pierre Folle, sur la commune de Montguyon. Mais rien ne vaut les formidables alignements de Carnac en Bretagne ou encore l’étrange silhouette de Stonehenge en Angleterre. Faute de documents écrits, on ignore quelle était leur signification. Moult bruits courent à leur sujet. On raconte que les "sentinelles" de Carnac seraient une armée romaine changée en pierre par Saint-Cornely (toute ressemblance avec l’armée enterrée de Xi’an, en Chine, n’est pas purement fortuite !) et une autre prétend que les Korrigans, petits êtres maléfiques, dansent la nuit au pied des menhirs. Au XIXe  siècle, les scientifiques ont penché pour l’astronomie : les rangées de mégalithes seraient orientées sur les axes de lever et coucher du soleil aux solstices, position qui permettrait d’observer les mouvements de la Lune et des étoiles. Un calendrier cosmique en quelque sorte ! On a aussi parlé de sépultures, de sacrifices. Sur le sujet, les avis restent partagés et aucune réponse formelle n’a été apportée.

 La présentation du projet par Alain Tanenbaum en présence de Michel Parent et Gérard Gaillard
En imaginant un champ constellé de pierres levées, Alain Tanenbaum ne cherche pas à susciter le mystère. Il s’inscrit dans un mouvement que nos ancêtres ont insufflé voici des millénaires. Il veut seulement perpétuer une tradition qui se perd dans la nuit des temps ! Pour point d’ancrage, il a choisi les carrières de Crazannes, près de Saintes. Un endroit extraordinaire dont la pierre a été extraite de l’Antiquité au XIXe siècle. Ce calcaire légèrement ambré a servi à la construction de l’arc romain de Germanicus (Saintes), Fort Boyard et la cathédrale de Cologne. Il serait présent dans le socle de la Statue de la Liberté. Tout un symbole !

Le musée des carriers
Un chantier sans fin 

Réunis voici quelques mois au Pôle Nature de Crazannes, les organisateurs ont présenté leur projet aux côtés de sculpteurs en résidence (l’Italie était à l’honneur cette année). Un plan ainsi que des panneaux explicatifs de la future galaxie des pierres levées figurent dans le musée.


En 2012, l’invitée d’honneur était l’Italie. Venise, la Sérénissime, est la source d’inspiration d’Antonella Tiozzo et de l’argentin Pablo Garelli. Rigides, droits comme des I, les blocs se sont animés au gré de leur imagination fertile. 


Soucieux de poursuivre la mise en valeur du patrimoine géologique et culturel du département, le Conseil général s’est associé à cette action de valorisation.
En quoi consiste-t-elle ? Sur un champ de quatre ou cinq hectares que le maire de Crazannes, Gérard Gaillard, s’est engagé à trouver sur son territoire, seront installés 365 mégalithes dédiés aux cultures des sociétés humaines contemporaines en ce début de XXIe siècle. Auteur d’un cercle, figure majeure accueillant les cinq pierres-mères des continents de la Terre, plusieurs branches rayonneront pour former un ensemble qui s’étendra dans l’espace.
La position des menhirs, coiffés d’un gros caillou, obéira aux règles de la suite de Fibonacci qui doit son nom au mathématicien Leonardo Pisano. En effet, dans le Liber Abaci publié au XIIIe siècle, il a décrit le système d’écriture décimale positionnelle étudié auprès de savants arabes. De là à l’utiliser pour former « une spirale galactique » à Crazannes, il n’y avait qu’un pas !

L’agencement des menhirs, qui seront coiffés d’un gros caillou, obéira aux règles de la suite de Fibonacci qui doit son nom au mathématicien du XIIIe siècle, Leonardo Pisano. Chaque pierre du champ mesurera 2,4 m de hauteur pour une base de 0,80 m. Elle sera posée sur un socle de 80 cm.
Le site ne sera pas uniquement consacré à ces sculptures imposantes, mais à l’ensemble des acteurs de la région. Des spectacles y seront organisés. Loin d’être figé, l’endroit sera animé ! Représentant le Conseil général, Michel Parent s’est félicité de « cette initiative qui irriguera toute la Charente-Maritime ». D’autres pierres levées existent dans la région comme le dolmen (moderne) de Daniel Moulinet à Colombiers. Un véritable parcours balisé à travers Aunis et Saintonge pourrait être élaboré. « C’est un chantier dont on ne verra pas la fin. D’autres le poursuivront après nous » estime Alain Tanenbaum. Pour les générations futures, ces mémoires de pierres constitueront la démarche d’un groupe soucieux d’avancer dans son époque, tout en privilégiant le travail des hommes qui l’ont précédé. Ces étranges pierres levées pourraient-elles succéder au chantier événement de l’Hermione, quand la frégate aura pris la mer ? « Un rêve sans étoiles est un rêve oublié » écrivait Paul Eluard. C’est pourquoi il faut croire en ces « présences » qui symboliseront notre passage comme le font, au large du Chili, les fameuses statues de l’Île de Pâques…

Les carrières de Crazannes : un lieu unique et énigmatique à découvrir.
 
 

• L’attrait de ce havre verdoyant réside en sa double attraction. Lors de la visite sur le terrain, Stéphane Majeau, un guide qu’il faut absolument rencontrer, y présente la pierre brute dans son environnement initial. Petit-fils de carrier, il connaît l’endroit comme sa poche et promène le public à travers ce véritable labyrinthe « historique ». S’y ajoute le volet artistique quand la pierre blanche chante sous les ciseaux des sculpteurs pour accoucher d’œuvres originales.

En honneur aux carriers

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